PRATIQUES CULTURALES DE L'AIL
L'ail du Québec est considéré comme une denrée rare qui a meilleur goût! Alors, pourquoi s'en priver ?
Pour jardiniers débutants et lecteurs curieux, découvrez ces différents aspects à considérer pour optimiser cette culture.
1. Calendrier des activités annuelles |
6. Irrigation: impact sur le rendement |
1. Calendrier des activités annuelles
JANVIER o planification de la production en cours et les futures parcelles |
FÉVRIER o choisir quelles variétés seront pour la vente et celles replanter |
MARS o attente impatiente de la fonte de la neige et de l'arrivée du printemps! |
AVRIL o pousses enfin sortent du sol o enlever les protections hivernales (s'il n'y a plus de risques de gel au sol) pour favoriser le réchauffement du sol |
MAI o croissance du feuillage et fertilisation o désherbage, irrigation au besoin et installation des pièges à phéromones pour prévenir les problèmes |
JUIN o fertilisation selon les besoins o continuité du désherbage, arrosage et dépistage des maladies ou parasites avant la récolte des fleurs d'ail |
JUILLET o récolte des bulbes si ± la moitié du feuillage est desséchée o séchage des bulbes, nommés « têtes d'ail » |
AOÛT o récolte des bulbes dont ± la moitié du feuillage est desséchée o séchage des bulbes nommés « têtes d'ail » |
SEPTEMBRE o préparation des prochains sites de plantation et des engrais o bulbes conditionnés disponibles à la vente |
OCTOBRE o division des bulbes, en caïeux individuels pour la plantation et installation de protections hivernales selon la zone de rusticité |
NOVEMBRE o espoir de recevoir beaucoup de neige pour recouvrir et protéger les caïeux du gel, car notre zone n'oblige pas de protection. |
DÉCEMBRE o dégustation des saveurs des produits sains bruts ou transformés grâce à la conservation de l'ail du Québec permettant d'en manger à l'année! |
2. Choix du terrain: type de sol
La culture de l'ail est possible dans de nombreuses régions du Québec, bien que les rendements et pratiques de culture varient selon les types de sols et les lieux de plantations.
L'ail tolère les sols au pH modérément acide (6,2) mais un pH de 6,6 à 7,2 est préférable pour une culture optimale.
Les sols riches en matières organiques sont à privilégier pour leur capacité à mieux retenir l’humidité et les éléments fertilisants. Ce type de sol offre l'avantage aux bulbes de gonfler plus régulièrement comparativement à un sol lourd ayant tendance à se croûter ou se tasser. Les sols sablonneux légers, quant à eux, retiennent moins l’humidité et impliquent des pratiques agronomiques plus intensives.
Bref, le champ idéal ne gonfle pas de manière excessive en raison du gel, est protégé du vent et reçoit une bonne couche de neige isolante.
3. Protections hivernales
Bien que les caïeux puissent tolérer des gels de -18°C, nombreux sont les producteurs qui utilisent des toiles ou des paillis pour tempérer le sol et protéger les racines des variations de température.
Généralement d’une épaisseur de 10 à 15 cm, le paillis doit idéalement être exempt de maladie, d’insecte (ex : nématodes) et de graines de plantes indésirables.
Au printemps, le paillis est enlevé par certains producteurs, tandis que d’autres le laissent en place pour l’utiliser dans leur lutte aux mauvaises herbes ou pour préserver l’humidité dépendant de leur type de sol.
4. Plantation: ce processus impacte le résultat
L’ail nécessite une période froide pour déclencher son processus de croissance. Au Québec, la plantation des caïeux est généralement réalisée à l'automne et la récolte des bulbes s'effectue l'été suivant.
Au moment de la plantation des semences, il est recommandé d’attendre au dernier moment avant de détacher individuellement les caïeux du bulbe pour éviter de les détériorer ou les dessécher.
Bien que le plant survivrait, il est préférable de placer les caïeux avec leur partie pointue vers le haut pour favoriser des tiges droites et des bulbes bien formés. Au printemps venu, si le sol est suffisamment humide et fertile, les plants se développeront correctement avant le déclenchement de la bulbaison.
Les distances de plantation ainsi que l’écartement des rangs, sont décidés selon les variétés de semence ainsi que les outils utilisés pour le sarclage. La quantité de caïeux plantés, sur une superficie donnée, peut donc varier de 700 à 1000 kg à l’hectare. À plus petite échelle? Cela signifie de distancer les plants de 10 à 15 cm les uns des autres sur le même rang et de laisser 30 cm entre les rangées.
Finalement, surtout pour les cultures biologiques, le contrôle des mauvaises herbes fait partie intégrante de la préparation du sol avant la plantation!
5. Fertilisation: éléments à analyser
Les analyses de sol sont nécessaires pour connaître exactement les quantités de fertilisants à apporter pour optimiser la culture de l'ail.
Voici les principaux éléments:
- l'apport est généralement fait 2 fois par année, soit à l'automne et au printemps,
- la quantité à atteindre varie entre 70 et 110 kg à l'hectare, selon les cultures précédentes et la teneur des matières organiques du sol.
- l'azote joue un rôle important avant la bulbification,
- toutefois un surplus d'azote, ajouté juste avant la récolte, nuira au séchage des bulbes, ce qui impacterait négativement la conservation.
- se retrouve normalement dans le compost mis au champ avant la plantation,
- la quantité recommandée varie de 30 à 190 kg à l'hectare de P2O5, soit de pentoxyde de phosphore.
POTASSIUM
- est lui aussi généralement retrouvé dans le compost,
- la quantité recommandée varie de 20 à 185 kg à l'hectare de K2O, soit de l'oxyde de potassium.
*** Attention d'utiliser du compost mûr, et non pas du compost frais de l'année, car autrement les têtes d'ail risquent de moisir avant même leur maturité... ***
6. Irrigation: impact direct sur le rendement
Le rendement de l’ail est directement influencé par le manque d’eau lors de sécheresse du sol ou durant la saison de végétation, spécialement au moment de la bulbaison.
Pour la majorité des types de sols, l’ail nécessite en moyenne 2,5 cm d’eau par semaine durant la phase de végétation. La quantité d’eau doit toutefois être ajustée aux sols sablonneux ou aux températures sèches et chaudes.
Pour éviter de détériorer l’ail, autant les bulbes que les feuilles extérieures de la gaine, il est recommandé de procéder à l’arrosage en début de journée pour permettre au feuillage d'être sec avant la nuit.
L’irrigation est cessée durant la maturation de l’ail et à l’approche de la récolte pour préserver l'intégrité des bulbes et faciliter cette étape.
7. Récolte : déterminer la maturité
La croissance des bulbes s’échelonne entre la fin du printemps et au cours de l’été. Les bulbes d'ail doubleront de grosseur durant leur dernier mois de croissance. La maturité des plants est visible au moment où les feuilles commencent à sécher. En effet, la récolte s’effectue lorsque 30 à 50% des feuilles commencent à être fanées. À maturité, le feuillage a produit les substances de dormance et les a envoyées dans les bulbes. Les feuilles sont en fait le prolongement des enveloppes du bulbe. La première feuille à la base du plant correspond à la pelure extérieure et ainsi de suite pour les suivantes.
Étonnamment, le niveau de maturité des bulbes influence directement la durée de conservation. Récoltés prématurément, les bulbes se conservent moins longtemps en risquant de devenir spongieux, perdre trop d'humidité et se ratatiner au séchage. À l’inverse, une récolte trop tardive augmente les risques d’avoir des bulbes tachés, une enveloppe partiellement décomposée et des caïeux découverts où maladies et moisissures pourraient s'installer.
La sortie de terre se fait manuellement ou mécaniquement en soulevant et en dégageant les bulbes, tout en évitant de les entrechoquer inutilement. Les bulbes ne doivent pas être lavés et leur tige laissée pour permettre la translocation des sucres vers le bulbe (la maturation prend entre 7 et 10 jours).
8. Séchage: conditionnement réussi
La durée de conservation est directement reliée au séchage. S'il est rapide, adéquat et débuté dès la récolte, cela réduira au minimum les infections microbiennes et fongiques ainsi que la perte d’humidité. L'ail est considéré sec lorsque toutes ses pelures sont bien sèches, incluant la structure interne sur laquelle sont fixés les caïeux. Seuls ces derniers doivent rester humides.
À la suite du séchage, les bulbes auront perdu entre 35 et 40% de leur poids initial. À ce stade, le feuillage est lui aussi bien sec, ce qui diminue les risques de maladies ou pourriture. En effet, le feuillage rétréci en séchant, ce qui rend le collet du bulbe étanche et lui assure ainsi une meilleure conservation à long terme.
Les méthodes de séchage peuvent varier selon les régions et les conditions climatiques. L'ail récolté est parfois laissé au champ quelques heures avant d'être apporté au bâtiment-séchoir. Toutefois, les bulbes d'ail sont sensibles aux insolations et, de plus, un excès de lumière peut faire verdir les caïeux. Séché à plat sur des grillages ou suspendu par lot de 10-15 plants, l’ail doit être séché dans un endroit bien aéré ou ventilé par le soufflage d’air. Le tout visant à retirer, le plus rapidement possible, l'humidité des pelures extérieures. À la suite du séchage, les plants sont taillés et nettoyés de leurs feuilles et surplus de racines.
9. Entreposage et Conservation
Les conditions d'entreposage, sans surprise, influenceront la conservation des bulbes d'ail. Selon l'utilisation future, soit dédié à la consommation ou plutôt à la création de semences, l'ail sera entreposé à des températures différentes.
Pour conserver à long terme, l'ail peut être réfrigéré entre 0 et -1°C bien que le taux d'humidité soit difficile à maintenir. Toutefois, ce sont les changements de température qui encouragent la germination. Sorti de la chambre froide, et gardé à l'air ambiant, cet ail germera rapidement (20-30 jours). Cette méthode convient seulement pour une consommation qui ne s'étire pas dans le temps. De plus, cet ail ne peut pas servir de semence.
Le niveau d'humidité lors de l'entreposage est un aspect important qui influence la durée de conservation de l'ail. En effet, si le niveau est trop faible (moins de 60%), les caïeux finiront par se dessécher. À l'inverse, une humidité élevée (plus de 75%) risque de déclencher le processus de germination. Une humidité encore plus élevée (85%) risque de favoriser les moisissures ou maladies. Il va sans dire que, lors de l'entreposage, la ventilation est importante pour que l'humidité soit uniformisée et, surtout, contrôlée.
L'ail du Québec, dédié à la consommation, est idéalement entreposé dans un endroit sec, aéré et tempéré préférablement entre 15 et 18°C. Les températures plus élevées favorisent la déshydratation puisque le niveau d'humidité devient difficile à maintenir. Gardé dans un panier ou dans un sac de papier, mais en évitant réfrigérateur et sac de plastique, les bulbes d'ail du Québec se conservent de 3 à 10 mois (parfois plus longtemps!) selon la variété.
10. Lutte intégrée: maladies, insectes, mauvaise herbes... savoir les identifier et surtout les contrôles!
Teigne du poireau
Insecte ravageur non indigène s’attaquant à l’ail, poireaux et oignons canadiens depuis 2007, ce petit papillon brun est rarement observé de jour, puisque nocturne. Gardant ses ailes repliées, il ressemble à un bout de bois. Les œufs sont blancs et difficilement observables puisque minuscules.
La présence de la teigne est généralement remarquée sous sa forme de chenilles vert clair se déplaçant sur les feuilles ou dans les tunnels qu’elles y ont creusés. Les symptômes sont surtout visibles sur le feuillage troué ou grugé par les larves. Les lésions créées par cet insecte augmentent la vulnérabilité des plans face aux maladies bactériennes et fongiques. Les dommages causés aux hampes florales sont fatals pour les fleurs d’ail. Deux à trois générations de teigne naissent durant la saison, entre juin et fin août. Les dégâts empirant à mesure que l’été avance…
Traitement de la teigne du poireau
La teigne est là, malgré les précautions?
Nématodes
Parasites microscopiques, les Anguillules des tiges et bulbes s’introduisent en début de saison. Les plants infectés sont rabougris, leurs feuilles jaunissent et des cloques s'y forment.
Atteints plus tard en saison, les plants voient leurs nouvelles pousses incapables de se recourber, les bulbes ramollis ou desséchés et leurs racines malades. Principalement actifs au printemps, s'ils trouvent votre plantation, les nématodes apparaîtront vers la mi-juillet et seront présents jusqu’à la récolte.
Traitement des Nématodes
Pourriture Blanche
Maladie fongique terricole, la Sclerotium cepivorum a la vilaine capacité de survivre entre 5 et 10 ans dans les champs infectés. Ce champignon est l’un des pires ennemis de l’ail!
Cette maladie cause des dommages significatifs aux feuilles extérieures qui jaunissent et arrête aussi la croissance des plants qui dépérissent. Le système racinaire est le premier touché, envahi de filaments blancs. Les dégâts peuvent également se poursuivre durant la conservation.
Traitement de la Pourriture Blanche
Moisissure Verte
Le champignon Penicillium, de type moisissure, est la principale cause de perte lors de l'entreposage en provoquant l'apparition d'amas de spores bleu-vert à la base de bulbe.
Provenant de spores se dispersant dans l’atmosphère, il est facile de contaminer des caïeux sains lors de manipulation de ceux infectés. Les caïeux blessés sont particulièrement réceptifs à la maladie et deviennent fragiles aux infections secondaires de bactéries ou maladies.
Le développement de la maladie et la germination des spores sont optimisés à des températures de 22-25°C. Une plantation trop hâtive, à la fin de l'été, quand le sol est chaud, peut augmenter la gravité de la pourriture des caïeux.
Traitement de la Moisissure Verte
Plantes Indésirables
Il n’y a pas de mauvaises plantes, mais elles ne poussent pas toujours au bon endroit! :)
Ceci dit, l’ail n’apprécie pas la concurrence racinaire et le rendement de la récolte est impacté si les bulbes sont envahi.